Au XVIIIe siècle en France, Franz Anton Mesmer, un scientifique autrichien charismatique et controversé va étudier et populariser ce qu’il appelle le « magnétisme animal » dans son ouvrage « Mémoire sur la découverte du magnétisme animal ». Une théorie qui s’appuie sur l’existence d’un fluide invisible à nos sens, qui pénètre l’univers tout entier et serait la cause réelle des différents phénomènes physiques.
Ainsi, d’après sa thèse numéro deux, « un fluide universellement répandu et continu d’une manière à ne souffrir aucun vide, dont la subtilité ne permet aucune comparaison et qui, de sa nature est susceptible de recevoir, propager et communiquer toutes les impressions du mouvement, est le moyen de cette influence« . Ainsi le fluide de Mesmer se manifesterait à travers les différentes forces de la nature comme la chaleur, l’électricité et le magnétisme. Il serait la cause de l’attraction des planètes dans l’espace, comme des mouvements de la vie. Ce fluide magnétique présent dans tous les animaux, « s’insinuant dans la substance des nerfs », se manifesterait en particulier dans le corps humain en montrant « des propriétés analogues à celles de l’aimant ».
La capacité du magnétiseur à manipuler le fluide magnétique contenu dans le corps du malade serait à la base des guérisons. La maladie est conçue comme un obstacle à la libre circulation du fluide magnétique à travers les différentes parties du corps et le traitement consiste à renforcer cette circulation du fluide magnétique dans le corps, en particulier par des massages.
Installé à Paris après avoir quitté Vienne suite à un scandale de mœurs lié à ses démonstrations spectaculaires, sa pratique rencontre un franc succès et passionne le milieu intellectuel parisien qui connaît alors une effervescence politique et un enthousiasme pour le progrès de la science, à l’aube de la révolution française. C’est dans ce mouvement culturel et politique que la « fièvre mesmériste » vient prendre place.
Cependant, en magnétisant publiquement des femmes souffrant de palpitations et de convulsions, en prônant le contact physique entre le magnétiseur et sa patiente, Mesmer finit cependant par susciter des critiques. Ses détracteurs le présentent comme un charlatan qui contribue à la frivolité des salons. Le pouvoir qu’acquièrent Mesmer et ses disciples commence à inquiéter certaines autorités scientifiques et politiques qui jugent que le « délire magnétique » est allé trop loin.
En 1784 une commission créée par l’Académie des sciences se penche sur la question du mesmérisme. Après avoir consacré plusieurs journées à tenter de déterminer la nature du fluide magnétique et ses propriétés thérapeutiques, les académiciens concluent leur examen par un verdict négatif. N’ayant pas trouvé de preuve physique de l’existence de fluide magnétique, la commission attribue les effets du mesmérisme à « l’imagination » des patients et dénonce les effets nocifs du mesmérisme sur la population.
La condamnation du mesmérisme se fondait sur des raisons scientifiques, essentiellement l’absence de preuve physique de l’existence du fluide magnétique mais aussi, selon la note secrète rédigée par les commissaires pour le ministre, sur le danger que constituait le mesmérisme pour les mœurs et au-delà, pour la stabilité de la société. La Commission de l’Académie des Sciences a condamné Mesmer comme un charlatan qui s’appuyait sur une fausse science pour profiter financièrement de la confiance de ses patients et qui mettait les mœurs en danger. Mais en même temps le verdict des savants devait reconnaître « l’influence de l’imagination » sur le corps comme fondement du mesmérisme et du somnambulisme. De fait le mesmérisme aura une influence capitale dans l’histoire de la psychiatrie et de la psychologie et, plus largement, sur le contexte culturel de l’Europe du 19e siècle.